En 1963, Gerhard Richter organise avec Konrad Lueg ce qu’ils appellent une « démonstration pour le réalisme capitaliste ». Cette manifestation répond à leur recherche d’une nouvelle manière de peindre qui échappe aux dogmes du réalisme socialiste et de l’abstraction. Pour Richter, la solution vient de la photographie populaire dont il copie avec application sur toile les qualités propres, comme la perfection lisse de la surface argentique ou le grain flouté dû à l’agrandissement. « Je peins comme un appareil photo. » Au regard du genre du paysage qui parcourt l’art de Richter depuis les années 1960, cette brume qui couvre le Paysage près de Coblence transcrit dans un langage contemporain le sublime d’une aube lumineuse qui rappelle l’art du peintre romantique allemand Caspar David Friedrich. « Mes paysages ne sont pas uniquement beaux, nostalgiques, romantiques ou classiques dans l’âme, tels des paradis perdus, ils sont surtout “trompeurs”. » La beauté d’un paysage, le moindre élément qui nous ravit, l’harmonie des tons, la paix, la violence d’une atmosphère, la douceur du trait, la magnificence des espaces, ce sont là des projections qu’il est possible d’effacer pour ne voir que ce qui est abject et laid.