Picasso dialogue avec les maîtres du passé avec une singulière familiarité pour ne pas dire impertinence. Avec un total sans-gêne et une grande complicité, il se confronte aux maîtres de la peinture : rien de moins que Vélasquez, Poussin, Rembrandt, Delacroix ou Manet. Cette Tête de mousquetaire n’en porte que le titre, car il s’agit d’une relecture du magistral Triple portrait du cardinal de Richelieu peint vers 1642 par Philippe de Champaigne – un exercice de style, un face à face si on peut dire. L’iconographie de cet étonnant triple portrait avait de quoi séduire le fondateur du cubisme. Réunissant la face et les deux profils, il était à l’origine destiné à un sculpteur qui devait s’en inspirer pour faire le buste du cardinal, à défaut de l’avoir in situ. Il apporte sa solution pour résoudre le problème initial : montrer toutes les faces d’un même personnage sur une seule toile, rendre les trois dimensions, la ligne médiane de la face dessinant nettement le profil. Le tableau fonctionne donc comme un rébus visuel, un divertissement d’amateur érudit.
© Succession Picasso / SOCAN (2021)