Raoul Dufy s’est associé au tout début du cubisme, allant en Provence sur les traces de Paul Cézanne. En 1913, il se réfère toujours au « maître d’Aix », mais différemment. Il ravive ses tons et utilise une touche « en tapisserie ». Au premier coup d’oeil, l’œuvre se déchiffre difficilement. Puis on devine un chemin avec quelques marches coincées entre deux gros rochers conduisant à un arbre dont une branche a été sectionnée, avec à gauche deux cyprès. La célèbre maxime de Cézanne trouve ici un écho particulièrement pertinent : « Traitez la nature par le cylindre, la sphère et le cône, le tout mis en perspective. » Pour Dufy comme pour Cézanne d’ailleurs, le travail sur la lumière reste central. Quand on compare cette Estaque avec les paysages boisés contemporains, plus sagement cézanniens, de ses anciens compagnons fauves, André Derain ou encore notre Maurice de Vlaminck avec Rueil près de Paris, on comprend à quel point Dufy a créé une esthétique distinctive.