Martha Ittuluka’naaq est dans la cinquantaine avancée lorsqu’elle se met aux arts graphiques. Elle réalise le dessin ayant servi à cette gravure en début de carrière. La composition représente les silhouettes épurées et répétitives qui allaient définir son œuvre. À Qamani’tuaq (Baker Lake), la communauté à l’intérieur des terres où vit l’artiste, les représentations d’animaux terrestres comme le bœuf musqué et le loup sont fréquentes, tandis qu’ailleurs on privilégie celles d’animaux marins. Chez Ittuluka’naaq, les animaux se présentent comme des formes bidimensionnelles, simplifiées, voire en apesanteur qui se multiplient et se déploient sur toute la surface de la composition. Elle se sert parfois de découpes comme gabarits. Ce traitement typique de son œuvre, où la forme l’emporte sur la ligne, est peut-être inspirée par son travail de couturière, particulièrement ses appliques.
Pour Ittuluka’naaq et nombre d’Inuits, l’art est un moyen de survie au milieu du vingtième siècle. En 1961, la famine et la maladie qui ravagent sa communauté l’incitent à s’installer à Baker Lake. À son arrivée, elle est veuve et sans revenu. La nouvelle industrie des arts de Baker Lake lui permet de subvenir aux besoins de sa famille et de passer du semi-nomadisme traditionnel à un mode de vie sédentaire régit par une économie salariale.