Ce tableau pittoresque est typique d’un certain romantisme historique, la nostalgie d’un passé révolu alimentant un penchant pour l’Ancien Régime chevaleresque. Peint après la chute du Second Empire par un artiste célébré qui a plus de soixante-dix ans, cette œuvre s’inscrit dans sa production tardive de scènes de vengeance, duels, assassinats, guet-apens et coups d’épée, avec une prédilection pour certains épisodes de l’Inquisition et des guerres de Religion – en particulier la Saint-Barthélemy. Dans cette mise en scène théâtrale, située au pied d’une poterne du Mont-Saint-Michel, Eugène Isabey multiplie des effets de scène romantiques : perspective en fuite de l’escalier; lumière en diagonale dramatique de la lune; dans la pénombre trouée par la lueur d’une lanterne rougie, on devine la statue d’une Vierge dans un oratoire. La composition explique immédiatement la tragédie : le meurtre avec la fuite de l’assassin et la découverte du corps par sa famille éplorée.