Ma main

Jutai Toonoo figure parmi les artistes influents de Cape Dorset qui se sont fait connaître au tournant du millénaire. Ces artistes envisagent le dessin comme une technique d’art à part entière plutôt qu’une étape préalable à la gravure. L’œuvre de Toonoo se distingue par sa psychologie sombre et iconoclaste. Tout au long de sa carrière, il s’est attaqué à l’esthétique de Cape Dorset qui, jusqu’à tout dernièrement, accordait la priorité aux représentations relativement sereines de la vie et du paysage inuits.


L’intérêt marqué de Toonoo pour le visage se fait sentir dès ses premières sculptures. Plus tard dans sa carrière, il se tourne vers l’autoportrait, un sujet jusqu’alors rarement abordé dans l’art inuit. Ma main témoigne de la nouvelle production de Cape Dorset qui, en ce début de millénaire, privilégie les sujets à caractère autobiographique. Ici, Toonoo souligne la dichotomie création/destruction. La représentation de sa main en tant que créateur évoque la main de Dieu touchant celle d’Adam dans la célèbre fresque du plafond de la chapelle Sixtine réalisée par Michel-Ange. L’aspect spectral du visage noir et la bague « tête de mort » confèrent à l’œuvre l’allure sinistre d’un memento mori, rappelant au spectateur que la mort le guette.